Le président de la République, qui a fait de l'éducation et la jeunesse la priorité de son quinquennat, a rendu hommage mardi en début d'après-midi, à Jules Ferry, le père des grandes lois sur l'école "gratuite, laïque et obligatoire" en déposant une gerbe au pied de la statue de Jules Ferry (1832-1893), au jardin des Tuileries.
Jules Ferry fut, en effet, un grand ministre de l’Instruction publique et des Beaux-arts. L’école de la République, l’école du peuple, lui doit beaucoup. A deux reprises, sans doute pour mieux marquer la priorité qu’il accordait à l’éducation, il cumula les fonctions de président du conseil des ministres et celles de ministre de l’Instruction publique et des Beaux-arts. Sans diminuer ses mérites tout en soulignant le courage politique qu'il exprima en ce domaine, et sans oublier qu’il fut un adepte de la grande expansion coloniale, Jules Ferry reprit à son compte, en les actualisant et les modernisant, les principes adoptés par François Guizot un demi-siècle auparavant pour l’école primaire. Des principes mis à mal par le sinistre Thiers que la troisième République sut heureusement réhabiliter. Avec Guizot, Victor Cousin et Benjamin Constant, l’Etat se préoccupait enfin de l’école pour les enfants des milieux modestes.
Quelques cinquante années plus tard, Jules Ferry entreprenait de réparer les désastres d’une école abandonnée. Les enfants du peuple allaient, enfin, avoir leur école. Néanmoins, Jules Ferry ne modifia guère les principes idéologiques qui la fondaient confirmant, ce faisant, cette double filière scolaire selon l'appartenance de classe. Un système binaire qui perdura de longues années sans que la controverse ne soit vraiment totalement éteinte. En témoigne le débat jamais clos de l'intérêt que peut présenter la lecture de la Princesse de Clèves, par exemple, ou de ceux, passionnés, autour du collège unique lié, l'aurait-on oublié ou feint-on de la croire, à la prolongation de l'obligation scolaire jusqu'à 16 ans. Pour mieux s’en convaincre, le lecteur se reportera à l’ouvrage préfacé par Mona Ozouf : Quand les enfants du peuple avaient leur école (Isoète, 2011). http://yvesmarion.over-blog.com/article-quand-les-enfants-du-peuple-avaient-leur-ecole-86247491.html link. Jules Ferry, de ce point de vue, prolongea, avec bonheur, l'oeuvre de Guizot élaborée bien évidemment dans le contexte d'une autre époque.
Comme Guizot qui sut s’entourer de conseillers éclairés, Jules Ferry appela auprès de lui l’un des pères fondateurs de la laïcité française. Ferdinand Buisson, (1841-1932), inspecteur général de l’instruction publique prit la direction de l’enseignement primaire et la conserva durant dix-huit années. Il fut l’un des inspirateurs éminents de la politique scolaire primaire qui perdura une bonne partie du 20e siècle. Voir à ce propos le remarquable ouvrage de Vincent Peillon, Une religion pour la République : la foi laïque de Ferdinand Buisson, Seuil 2010, 278 pages, 19 € http://www.vincent-peillon.fr/ link
Cet éloge prononcé ce 15 mai 2012, au Jardin des Tuileries, à Paris, devant le monument érigé à la mémoire de Jules Ferry, grâce à une souscription faites auprès des écoliers de France, par le nouveau président de la République, le jour de son investiture constitue un moment fort pour tous ceux qui ont à cœur les valeurs de l’école de la République. En ce début du 21e siècle, notre Ecole, et particulièrement notre Ecole primaire, avait bien besoin de ce retour aux sources manifestement inspiré des leçons de Ferdinand Buisson, brillamment et très justement rappelées par Vincent Peillon, pour que les enfants du peuple retrouvent une école qui réponde à leurs légitimes aspirations.
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