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15 janvier 2024 1 15 /01 /janvier /2024 09:11

15 janvier 2024,  il y a exactement cent ans, une Saint-Loise décédait à Paris. Le 15 janvier 1924, Madeleine Deries, la fille du très estimé inspecteur d'académie de la Manche qui venait de prendre sa retraite, expirait à l'âge de 29 ans.

Une femme savante, une Saint-Loise, venait de mourir. 

 

« Une femme savante vient de mourir ». Tel, en effet, était le titre que L'Écho du Nord donnait à son article publié dans l’édition du 3 février 1924 [1] : « Mlle Deries était bien la première femme qui ait conquis le grade de docteur ès lettres (section histoire). Elle avait été professeur à l'institut Sévigné de Roubaix et paraissait appelée au plus brillant avenir ».

Clichés : La Française, 1923, et Ouest-Eclair du 23 mars 1923

Le titre était très justement choisi. Sans exception, tous s'accordèrent à déplorer l'immense perte que représentait cette brutale disparition. Perte pour l'histoire de la cité saint-loise et du département de la Manche que la presse locale et les sociétés savantes et historiques du département ne manquèrent pas de relayer ; perte pour le pays que ne manqua pas de souligner la presse nationale ; perte aussi  pour la recherche et l'histoire qui désespéra les historiens qui fondaient de grandes espérances en leur jeune collègue ; perte surtout pour un père qui avait reporté les espoirs de ses vieux jours sur sa fille et qui l'exprima au travers de pages émouvantes.

 

Partie de Saint-Lô où elle était née il n’y avait pas encore vingt-neuf années, Madeleine revint rejoindre la sépulture familiale. En ce samedi 19 janvier 1924, il faisait froid à Saint-Lô comme sur l’ensemble du pays. Le ciel était triste comme l’était la cité. L’Enclos et la rue Dame-Denise étaient en deuil. L’église Notre-Dame qui avait tant de fois reçu Madeleine était, ce jour, tendue de noir pour accueillir l’une de ses éminentes paroissiennes. Le cortège, rapporte le journaliste, s’ébranla lentement et silencieusement, pour accompagner respectueusement le corps de la jeune femme « dans ce coin retiré de ce jardin toujours vert du cimetière de Saint-Lô », rejoindre la sépulture familiale « à l’ombre de la croix » auprès de ceux qui l’avaient aimée et qu’elle avait aimés.

Ce fut en silence que chacun se retira laissant un mari et un père à leur peine avec les souvenirs de celle qui appelait à méditer sur la fugacité de l’existence en ce monde. Ce que Léon Deries traduisit en écrivant[1] : « Ici-même, à ton âge, une couronne sur la tête et des épis plein les mains, qu’il faisait bon vivre ! »

Sépulture Simon-Deries, cimetière de Saint-Lô. ©Yves Marion, 2017. 

Une jeune femme, engagée comme en témoignent les articles qu'elle avait publiés, promise à une belle carrière, venait de disparaître. Trop tôt, trop jeune.

Qu'a pu retenir la mémoire collective et de quelle manière le souvenir de la jeune Saint-Loise est-il honoré, notamment dans la cité et le département de ses origines? Madeleine Deries, la Saint-Loise est l’une de ces pionnières oubliées. Elle ne devrait plus l’être.

Extrait de Nécrologie de Madeleine Deries par Alphonse Aulard dans Révolution française


[1] Léon Deries,  « In memoriam », Le jardin des souvenirs, Saint-Lô, Imp. Jacqueline, 1928, p. 145-147. Les citations précédentes en sont extraites. Le texte intégral sera reproduit dans les pages qui vont suivre.

 

 

[1] L’Écho du Nord, 3 février 1924. 

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Published by Yves Marion