Le jour des morts
Au sénateur Maurice Faure
Pendant qu’une foule vers les tombes se presse
Pour réciter sans fin des prières, des vœux,
Ouvrier ou paysan, songe à ces malheureux
Qui ont souffert pour toi sans plainte, sans tristesse !
Combien d’ouvriers sont morts sur la tâche meurtrière,
Pour sauver chaque fois la vie d’humains !
Combien de paysans sont morts sur cette terre
Qu’ils voulaient défricher de leurs robustes mains !
Combien de grands penseurs ont péri dans les flammes
Des bûchers allumés par le prêtre et la foi,
Et combien de soldats dans des guerres infâmes
Sont allés vers la mort pour un indigne roi !
A tous ceux-là songeons en ce jour de tristesse,
Disons à nos enfants combien leur cœur est bon ;
De tous ces morts gardons le souvenir sans cesse,
Pensons à leur courage et redisons leur nom !
Ghardimaou, le 29 octobre 1909
Ernest Reynaud, La Muse laïque, Paris, Société d'imprimerie et de librairie, 1910
Poésies avec lettre-préface de Maurice Faure, dédiées à Camille Pelletan